Quel plan de nutrition pour réussir son UTMB ? Quels conseils d'alimentation pour son prochain ultra-trail ? Mathieu Blanchard livre ses petites astuces...
Mathieu Blanchard a rejoint l’aventure Näak dès le kilomètre 0. Il concluait son premier UTMB, en 2018, à la 13ème position, en 23h53, avec les prototypes de nos barres énergétiques. Depuis, l’ultra-traileur français est monté deux fois sur le podium du mythe chamoniard, n’est plus sorti du top 5 à compter de 2021 et fait partie des rares hommes à être passé sous la barre symbolique des 20h. Nous grandissons ensemble. Ici, avec nos équipes, il se sent donc en confiance, à la maison.
C’est la raison pour laquelle il nous livre, à cœur ouvert, ses conseils de nutrition pour réussir son UTMB. D’ailleurs, Mathieu Blanchard insiste : il s’agit plus de constats qui fonctionnent pour lui que de véritables conseils applicables par toutes et tous. Il s’agit d’habitudes personnelles plutôt que de secrets renversants, et d’astuces qui proviennent de son expérience plutôt que de la science. Chacun sera donc libre de piocher dans ces anecdotes ce qu’il juge intéressant pour sa propre performance, fin août à Chamonix, ou lors de son prochain ultra-trail.
*‘NÄAK CONSEILS’ est notre nouvelle série d’articles : une rubrique dans laquelle nos athlètes professionnels vous partagent leurs conseils et expériences afin que vous puissiez vous aussi atteindre vos objectifs le Jour J. Pour retrouver tous les articles de la rubrique, c’est par ici :NÄAK TIPS
AVANT LA COURSE
CONSEIL UTMB #1 PAR MATHIEU BLANCHARD: « NE PAS NÉGLIGER LA LIPOLYSE* »
« Il y a actuellement une ‘trend’ autour des glucides. Les traileuses et traileurs ont tendance à évoquer leur nutrition de l’effort uniquement sous le prisme des glucides par heure. Certains sons de cloche affirment même que la lipolyse n’a plus d’utilité. Je suis convaincu du contraire, qu’il s’agit d’une mode et que tout bientôt, la lipolyse retrouvera ses lettres de noblesse. Raison pour laquelle je l’entretiens toute l’année.
Comment ? En partant m’entraîner à jeun la grande majorité du temps. En revanche, peu importe la séance, qu’il s’agisse d’un fractionné ou d’une endurance longue, je pars toujours avec une flasque de Drink Mix et quelques gaufres, gels ou purées énergétiques, que je consomme à l’envie. Parfois, lorsque je reviens, j’ai tout mangé, je n’ai plus rien dans le sac ; d’autres fois, je n’ai absolument rien touché.
Ce process est motivé par la volonté d’écouter mes sensations, ma faim, et surtout, de voir mes deux usines du corps – celle qui créé du carburant à partir des glucides, et celle qui produit de l’énergie à base de lipides – fonctionner à plein régime le jour de l’UTMB. En ce sens, je trouve cela génial que les produits Näak spécifiques à l’ultra-trail contiennent des glucides, mais aussi des lipides.»
*Pour résumer en des termes simples, la lipolyse est le mécanisme via lequel le corps transforme les lipides – c’est-à-dire les graisses – en énergie, ou carburant, pour fonctionner de façon optimale.
CONSEIL UTMB #2 PAR MATHIEU BLANCHARD : « DU GUT TRAINING, OUI ! MAIS PAS SPÉCIFIQUE ET LOCALISÉ...»
« Je pratiquais souvent le ‘gut training’ lorsque j’étais ‘bébé-ultra-traileur’, lorsque mon ventre n’avait pas encore processé, quand mon corps ne savait pas encore comment assimiler toute ma nutrition de l’effort. Désormais, lors de mon training quotidien, je fonctionne beaucoup plus à la sensation.
Globalement, je mange quand j’en ai l’envie, ou le besoin. Pour l’UTMB, mon ‘gut training’ est donc spécifique et localisé. À S-4, S-3 et S-2 avant la course – c’est-à-dire 4, 3 et 2 semaines en amont du Jour J – je réalise des blocs de 3 jours consécutifs de volume, en enchaînant 4h – 6h – 6h ou 6h – 8h – 8h d’entraînement, en alternant trail et vélo. Durant ces 3 enchaînements, sur la dernière journée de chacun de ces blocs, j’effectue le fameux ‘gut training’ spécifique à l’UTMB.
Ainsi, pendant 6 ou 8h, je vais m’alimenter en respectant le plan de nutrition prévu pour la course, aux alentours de 80 gr de glucides, soit l’équivalent de 400 kcal. Je reste à un rythme d’endurance fondamentale, certes moins élevé que celui de l’UTMB, mais avec la fatigue des 2 jours précédents, cela rend l’effort quasiment comparable. Pour résumer, je fais du ‘gut training’ spécifique, mais pas au quotidien, plutôt de façon localisée. »
CONSEIL UTMB #3 PAR MATHIEU BLANCHARD : « PRATIQUER LE RÉGIME SCANDINAVE** PENDANT LA PÉRIODE D’AFFÛTAGE »
« Je tiens à préciser, à nouveau, qu’il s’agit d’habitudes basées sur mon expérience plutôt que de conseils tirés de la science... Mais j’ai pour coutume, entre J-10 et J-3 avant un ultra-trail, de m’alimenter selon un régime assez semblable au régime scandinave. Et pas nécessairement en vue de l’objectif initial recherché par ce dernier, c’est-à-dire optimiser la recharge glucidique à partir de J-3 !
Non, l’idée derrière ce modèle alimentaire tourné vers les lipides et les protéines est de : faire le plein de micronutriments, réactiver une dernière fois la lipolyse, mais surtout, éviter de prendre 2 ou 3 kilos avant l’épreuve. En effet, lors de l’affûtage, lorsque je réduis drastiquement le sport – je ne sais pas pourquoi – mon appétit remonte en flèche. J’ai tout le temps faim alors que mon corps ne brûle quasiment plus rien.
Je suis à la maison, je tourne en rond et je n’ai qu’une envie : ouvrir le frigo. J’imagine que cela prend sa source quelque part dans le stress. Se rapprocher du régime scandinave me permet donc de contrôler mon poids pendant l’affûtage. Ensuite, à partir de J-3, je recharge à nouveau copieusement en glucides. Les petits-déjeuners redeviennent gourmands, j’ai mes petites tartines chaque matin ainsi que des portions de quinoa, de riz ou de patate douce à chaque repas ! »
**Le régime scandinave est un terme qui revient très régulièrement dans le jargon sportif pour qualifier une stratégie d’alimentation avant une course. Le régime scandinave, dit aussi régime dissocié, se pratique la semaine précédant l’épreuve et a pour objectif de maximiser les réserves énergétiques de votre corps, en visant notamment un taux de glycogène optimal le Jour J. Comment ? En diminuant fortement les glucides de J-6 à J-3 (et en les remplaçant par des protéines) puis en faisant l’inverse de J-3 à J-1 ! Cela peut fonctionner, mais son efficacité n’est pas systématique.
PENDANT LA COURSE
CONSEIL UTMB #4 PAR MATHIEU BLANCHARD : « PARTIR LE VENTRE LÉGER »
« J’aime partir sur l’UTMB le ventre léger ! Car même si je gère plutôt bien mon stress, l’appréhension du départ joue forcément sur la digestion. Je préfère donc jouer la sécurité en mangeant moins quelques heures avant la course, quitte à compenser ensuite ce petit manque d’énergie durant la première heure de course.
Mon conseil serait donc d’éviter la recharge glucidique de panique... Car les réserves de glycogène ne se remplissent pas dans les 3 dernières heures avant le ‘start’ ! Pour te donner un exemple, lors de la Maxi-Race (93 km & 5400 D+), je suis parti à jeun.
C’est très personnel mais ça fonctionne pour moi : je me sens mieux ainsi. Je ne mange pas grand-chose avant les ultra-trails car de mon point de vue, le jeu n’en vaut pas la chandelle. À vouloir rentrer trop de glucides en ‘last minute’, on a plus à perdre qu’à gagner. »
CONSEIL UTMB #5 PAR MATHIEU BLANCHARD : « MANGER UNE GAUFRE SUR LA LIGNE DE DÉPART »
« Il s’agit d’un petit rituel. Comme je sais que je ne vais rien consommer de solide pendant l’ensemble de l’UTMB – puisque je tourne uniquement avec le Drink Mix, les gels et les purées énergétiques – je m’autorise un dernier kiff sur la ligne de départ, en mangeant une petite gaufre, seulement 3 minutes avant que le speaker ne lâche les fauves. Je pioche indifféremment dans le pack variété car j’aime toutes les saveurs et j’apprécie me laisser surprendre. Je me souviens qu’à la Maxi-Race, il était 4h40 du matin et que cette gaufre était au sirop d’érable ! »
CONSEIL UTMB #6 PAR MATHIEU BLANCHARD : « S’ALIMENTER BEAUCOUP DÈS LE DÉBUT DE COURSE»
« Si tu m’interroges sur l’endroit-clé de l’UTMB d’un point de vue nutritionnel, je te réponds sans hésitation ‘la première heure de course’. D’ailleurs, je commence à m’alimenter dès la portion de plat qui précède la montée initiale des Houches. J’ai remarqué qu’autour de moi peu de coureurs le font, ce qui, de mon point de vue, représente une erreur.
Je consomme près de 120 gr de glucides durant cette première heure de course, soit l’équivalent de 500 kcal. Pourquoi ? Car jusqu’à Notre-Dame-de-La-Gorge, le rythme se veut effréné. Avec l’effervescence, l’ambiance et les terrains peu techniques jusque-là, j’ai l’impression de courir un marathon sur route ! C’est très intense. Puis, dans l’ascension vers le col du Bonhomme, ça se calme légèrement !
Je maximise donc mes apports énergétiques dès les premiers kilomètres pour assumer ce départ rapide, mais surtout, pour préserver le plus possible mes réserves en glycogène. Mon corps va directement utiliser l’énergie que je lui mets à disposition plutôt que taper dans ces stocks dont j’aurais besoin bien plus tard pendant la course. Pour résumer, manger tôt permet d’entamer ses réserves le plus tard possible ! »
CONSEIL UTMB #7 PAR MATHIEU BLANCHARD : « ANTICIPER PLUTÔT QUE D’ATTENDRE D’AVOIR FAIM »
« C’est d’ailleurs dans cette optique que nous avons codéveloppé le ‘Näak Calculator’ (lien appli), une application gratuite qui permet de construire son plan de nutrition personnalisé en fonction des spécificités de la course, de ses ambitions sur celle-ci et de ses préférences nutritionnelles.
L’erreur serait de considérer ce plan comme un schéma immuable inscrit dans le marbre auquel on ne peut pas déroger. Non ! Il s’agit simplement d’un cadre dans lequel évoluer sereinement et à partir duquel s’adapter en fonction des aléas. S’y fier permet d’anticiper la faim et les coups de bambou.
Car si tu attends d’en ressentir le besoin pour manger, alors tu peux considérer qu’il est déjà trop tard : l’hypoglycémie guette au prochain virage. En 2018, pour mon premier UTMB, j’ai commis cette grave erreur. Déjà, je suis parti en mode ‘groupie’, avec Kilian Jornet et Jim Walmsley, alors que je n’avais rien à faire là !
Et pire encore, je m’alimentais lorsque j’en avais l’envie, avec, à l’époque, les toutes premières barres énergétiques Näak (lien prod). Au bout de 5h, évidemment, l’envie avait disparu. À partir de là, ce fut un long chemin de croix. Je me demande encore comment j’ai réussi à rallier la ligne d’arrivée... »
CONSEIL UTMB #8 PAR MATHIEU BLANCHARD : « BIEN DOSER LA CAFÉINE»
« J’apprécie énormément le café. J’en bois quotidiennement, à raison d’un ou deux par jour, le matin, avant d’aller m’entraîner. Les 3 dernières années, je pratiquais donc un sevrage durant l’affûtage. Concrètement, à J-10, j’arrêtais le café jusqu’au jour de la course, dans l’espoir de provoquer un effet ‘kiss cool’.
J’ai fait évoluer ma démarche très récemment, à la suite de l’envoi d’une étude sur le sujet par Guillaume Millet, un scientifique qui travaille avec le Team Salomon sur l’optimisation de notre performance. Celle-ci prouvait qu’il était particulièrement traumatisant pour un corps habitué au café de le priver aussi brusquement, et que par conséquent, les conséquences délétères se révélaient bien supérieures aux bénéfices recherchés via le sevrage.
En amont de la Maxi-Race, je n’ai donc rien changé à ma consommation, et cela a plutôt bien marché ! Pendant la course en revanche, j’évite les prises de risque. Je m’interdis les gélules de caféine car elles sont pour moi surdosées et peuvent générer des troubles intestinaux.
Je me limite ainsi à 3 ou 4 gels énergétiques caféinés sur l’ensemble de l’UTMB, dont le premier que j’ouvre au sommet du Grand Col Ferret, à l’aube, en respect de mon cycle circadien naturel : au quotidien, j’aime prendre mon café au petit matin, avec les premiers rayons du soleil. »
CONSEIL UTMB #9 PAR MATHIEU BLANCHARD : « AUX RAVITAILLEMENTS AVEC ASSISTANCE, PRIVILÉGIER LE SALÉ »
« Cela peut paraître bête et méchant, mais je crois qu’il fait bon le rappeler... La nutrition du sport est majoritairement sucrée, donc disposer d’options salées lors des ravitaillements avec assistance va permettre de casser cette sensation d’écœurement qui peut te saisir après plusieurs heures d’efforts en ultra-trail. De mon côté, les purées énergétiques à la patate douce fonctionnent parfaitement à cet égard. »
APRÈS LA COURSE
CONSEIL UTMB #10 PAR MATHIEU BLANCHARD : « OPTIMISER LA RÉCUPÉRATION AVEC DES PROTÉINES »
« Évidemment, mon principal conseil sera de savourer, de se faire plaisir, de s’écouter et de manger à sa faim, en qualité et en quantité, même si l’appétit nous saisit en dehors des heures de repas. C’est une réaction normale après un ultra-trail : le corps a besoin de se régénérer et cela peut prendre plusieurs jours, voire plusieurs semaines !
Un autre conseil, légèrement plus pointu et contraignant, sera de se montrer vigilant quant aux apports en protéine. En effet, ce sont ces dernières qui vont permettre la reconstruction musculaire. Mon objectif de l’année étant la Diagonale des Fous, 2 mois après l’UTMB, favoriser une bonne récupération, pleine et rapide, sera un enjeu crucial.
Pour cela, je resterai dans la lignée de ce que je fais toute l’année : un shaker de boisson de récupération protéinée après chaque course ou entraînement. À cet égard, la présence de protéines dans la majorité des produits Näak – même si je sais les études scientifiques divergentes quant à l’assimilation des protéines à l’effort – m’enthousiasme. J’ai la conviction de préparer ma récupération alors même que je suis encore en train de courir grâce aux protéines contenues dans le Drink Mix, les gels ou les barres énergétiques. »
LE PLAN NUTRITIONNEL DE MATHIEU BLANCHARD POUR L'UTMB:
« Mon plan de nutrition pour l’UTMB est extrêmement simple. Au fur et à mesure des années de pratique, avec l’expérience, j’ai d’ailleurs essayé de l’épurer au maximum. Je vise donc 80 gr de glucides par heure, soit environ 400 kcal/h, en passant majoritairement par le Drink Mix, que je complète d’un gel.
Cela donne en moyenne : une flasque de 500 mL de Drink Mix et un gel énergétique par heure. Aux ravitaillements assistés, j’ai également simplifié. Je tâche d’être minimaliste : des purées énergétiques salées à la patate douce, pour casser le sucre ; et 3 petites bouteilles : une de Coca-Cola, une d’eau plate et une d’eau pétillante. »
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